mardi 29 décembre 2015

Où sont passés les anges ?

- Pourquoi nous ne voyons plus les anges ? Où sont-ils passés ?

- Quiconque atteint la sainte humilité est en mesure de discerner les anges. Il n'est donc pas si étonnant qu'a notre époque nous ne puissions plus les voir, alors qu'ils sont toujours là...

La vérité

La vérité n'est pas une option. L’homme peut feindre de l’ignorer, mais aucun humain ne peut s'y soustraire. Tout comme la mort, la vérité est inéluctable, elle finit toujours par s’imposer...

La joie

La joie est en étroite relation avec la création. Expérimenter l'aube d'une existence, avoir la conscience d'une éclosion, ne peut se faire sans la joie. Créer où être créé, présuppose l'énergie de la joie. La joie c'est l'infini en mouvement, l'amour en éruption, l'incommensurable et l'éternel, lorsqu'ils rencontrent l'espace-temps, lorsqu'ils se choisissent un commencement, une forme ou un support. La joie est la perception extatique de l'être qui s'ouvre à la conscience de sa propre existence. La joie est l'interface entre l'infini, l'insondable, le divin d'une part et le fini, le créé, l'humain, d'autre part.

La joie est la main tendue de Dieu...

mardi 1 décembre 2015

Un 13 novembre, à Paris...

Il ferme lentement les paupières, étendu sur une moquette humectée par son sang qui fuit. Il ne ressent ni douleur, ni même haine. 

Sa vie s'achève dans un lieu improbable, appelé Bataclan. Un endroit qu'il avait pourtant rejoint pour oublier les déboires d’un monde meurtri. Curieusement, c’est au seuil de la mort qu’il s’attache à la vie, lui qui avait quelque peu perdu le fil de son existence. 

Il voit les éclairs des mitraillettes, mais ne perçoit plus le bruit. Ces personnes qui chutent devant ses yeux, au ralenti, le renvoient aux feuilles d'automne qu'il admirait autrefois, devant sa fenêtre, se demandant: "c'est donc ainsi ? faut-il toujours que la vie s'arrête pour que la vie recommence ?"

Il ne connaît pas les personnes qui se trouvent là, il ne peut pas les secourir, il a juste le temps de les aimer, avant qu'elles ne s'effondrent autour de lui. 

De temps à autre, ses yeux distinguent une silhouette pliée qui rampe péniblement vers la sortie, ses lèvres esquissent alors un sourire et son âme s'écrie: "respire pour moi un peu d'air frais l'ami !"

Ses souvenirs sont trop nombreux pour tenir dans sa mémoire. Ils se décantent un par un, au fond de son être, dans toute leur force et dans leurs intimes faiblesses. Leur présence le réconforte, et il pense : "si mes souvenirs surgissent dans un moment aussi critique, c'est qu'ils ne disparaîtront jamais. D'ailleurs, pourquoi disparaîtraient-ils ? Ne vont-ils pas perdurer dans les joues potelées de mon enfant, dans les bras réconfortants de ma chérie, dans les yeux lumineux de ma mère et dans l'humour décalé de mes amis ?

Mon corps va disparaître, mais pas la terre de France qui m'a vu  naître et qui s'apprête à m'accueillir. 

Je pars ainsi en éclaireur, j'enjambe plus tôt que prévu la barrière du temps, j'emmène avec moi l'espoir naissant de mes congénères, qui vont de nouveau réaliser l'importance de la vie et de ceux qui en défendent les valeurs.

Je n'arrive pas à haïr mes assassins, parce que je n'arrive pas à comprendre ce qui les motive à agir de la sorte. Et puis le temps qui me reste est si court. Je préfère avoir pitié d'eux, je préfère que ma mort serve aux vivants, qu'ils comprennent pourquoi et comment on en est arrivé là. Je préfère même pardonner, en espérant que ceux qui restent trouveront les solutions et qu'ils réussiront à désamorcer la haine qui anime mes assaillants, sans pour autant déchaîner leurs propres démons.

Comment leur faire comprendre que le plus précieux des trésors n’est autre que l'amour qui unit les hommes ? Comme seul bagage, j’emporte avec moi la somme d'amour que j'ai connue dans ma vie. Seule la force de cet amour me transportera, moi et mes compagnons, dans les sphères l'au-delà."

Il se sent étonnamment bien, il va changer de lieu, emportant avec lui ce qu'il a de mieux, laissant derrière lui les parents et les amis, se disant dans le creux de la fosse: "pourvu que cette tragédie aide les hommes à construire un monde meilleur."

Puis il ferme délicatement les yeux...

La prière du coeur...

  • Un mouvement citoyen sans précédent suscite un immense espoir au sein d'une majorité silencieuse et souffrante du peuple Libanais.  

    Pour ma part, je crains que toutes ces personnes, sincèrement assoiffées de paix, de justice et de fraternité, ne soient profondément et implacablement déçues. 

    Il me semble en effet que dans un pays où certains individus peuvent assassiner tout en demeurant impunis; où les institutions religieuses, transformées en partis politiques, se déchirent; où les politiciens sont des espèces de mutants consanguins appartenant à des familles régnantes; où la corruption est un euphémisme; où les intérêts des pays étrangers priment sur l'intérêt national; où des milices partisanes ont plus de pouvoir qu'une armée officielle fragmentée; où l'intérêt personnel, familial et clanique prend le dessus sur l'intérêt collectif et citoyen; où l'on cite Dieu deux fois par conversation, puis on le passe sous silence au moment où il est question d'argent; Dans un tel pays, une manifestation pacifique n'a qu'une infime chance d'aboutir.

    Je me demande si à force de regarder des films, de se connecter sur Facebook ou de s'imprégner du monde occidental par le biais du web et des voyages, les Libanais n'ont pas fini par croire qu'ils vivaient vraiment dans un pays démocratique... 

    Je crains que l'intellect des Libanais, par ailleurs très évolué et de très haut niveau, ne leur joue des tours, en leur faisant croire qu'il suffit de penser les choses et de les imaginer pour qu'elles se réalisent dans les faits.

    Je crains que notre jeunesse, comme toute jeunesse d'ailleurs, ne soit entrain d'idéaliser son désir et son monde, sans prendre la mesure des forces du mal qui se dressent contre elle, ni de l’âpreté de la lutte qu'un tel mouvement suppose.

    Il est évident que pour traiter efficacement une pathologie, il est nécessaire dans un premier temps de bien établir le diagnostic. 

    Ne nous voilons pas la face, si ce type de gouvernants est en place c'est que nous y sommes pour quelque chose. Dans leur vices, leur priorités, leurs réflexions et leurs agissements, ils ne font que nous renvoyer nos vices, nos priorités, nos réflexions et nos agissements. Les politiciens reflètent nos mentalités rampantes, en mille fois plus développées, plus "sophistiquées".
    On dit bien que ce n'est pas le roi qui appelle le peuple mais c'est le peuple qui appelle le roi. Ceux qui élèvent leur voix ne doivent pas oublier qu'ils vivent dans un pays où, habituellement, on achète les voix...

    De cet état lieux, il résulte deux éléments: Premièrement, à moins d'un bouleversement radical et intime des mentalités, les choses ne bougeront pas. Deuxièmement, si les choses bougent, cela se fera au prix d'un lourd tribut.

    En priorité, et pour être en capacité de mener à son terme un tel mouvement, chaque manifestant devra vaincre ses propres démons, préciser les contours de son éthique personnelle, mettre au point ses principes politiques et sociaux, et ses convictions religieuses, en les harmonisant sous une seule bannière, celle d'un peuple unifié qui manifeste pour la reconquête de ses droits civils les plus fondamentaux. Rien ne doit pouvoir le détourner de ce objectif. C'est le pré-requis minimum pour un mouvement dont l'ambition est, ni plus ni moins, de bouleverser un système archaïque et féodal établi à l'échelle d'une nation, et ce depuis des décennies. 
    
    Chaque manifestant doit savoir se remettre en question, dès le départ, et tout au long du conflit, de manière à préserver l'unité du mouvement.
    
    D'autre part, chaque manifestant doit être conscient des conséquences qu'un tel engagement peut avoir sur sa vie personnelle et être disposé à offrir plus que des cris et des slogans. Il ne suffira pas d'user ses semelles sur le bitume, il faudra aussi user de son temps, de son argent, de son énergie et peut-être même de son intégrité physique. Il ne suffira pas de faire l'intérimaire de la manif, il faudra garder le cap, persévérer dans un mouvement de longue haleine qui exige des sacrifices et qui pourrait bouleverser un agenda personnel ou le cours d'une vie.
    
    Sans compter que les risques de récupération et de fausses interprétations, et donc de désunion et d'affrontements violents, seront légion dans le contexte d'un pays qui a plus connu de voitures piégées que d'élections véritablement démocratiques. 
    
    Par conséquent, il faudra s'attendre à ce que la corruption, la manipulation, la délation et la violence rôdent, qu'elles s'immiscent et se cachent dans tous les coins de rue et dans toutes sortes d’individus. Elles ne seront pas le seul apanage des politiciens et de leurs sbires.
    
    Tout cela peut faire craindre une tournure des événements, vers un dérapage non contrôlé, un pschiiit, voire une explosion. 
    
    Tout cela souligne surtout les innombrables obstacles à franchir et l'ampleur du travail à fournir en dedans et en dehors de chaque libanais, en vue de générer et de maintenir un véritable espoir de renouveau autour de cette initiative authentiquement citoyenne.
    
    
    Autant dire que la tâche s'annonce ardue, voire insurmontable.
    Mon premier réflexe d'homme croyant a été de prier Dieu de protéger toutes ces gens, car le prix à payer pour que le mouvement réussisse, et pour éviter qu'il ne se transforme en une énième descente aux enfers, risque d'être bien plus lourd que ceux qui l'ont initié ne l'ont peut-être imaginé. 
    
    En tout état de cause, il ne fait aucun doute que ce mouvement est noble dans l'intention, il est parti et il ne s'arrêtera pas tout seul...
    Pourvu que les bonnes intentions de cet élan citoyen puissent paver un avenir radieux pour les générations futures et non pas une nouvelle place en enfer pour un pays en chute libre.
    
    Quant à moi, je continuerai à me réfugier dans mes prières, comme je le fais tous les soirs depuis le jour où j'ai quitté le Liban. Comme tant de personnes viscéralement attachées à ce pays, j'ai dû construire ma vie dans l'exil, la mort dans l'âme. N'ayant pas eu le courage de rentrer, j'ai passé mon chemin. 
    C'est le seul moyen que j'avais trouvé à l'époque pour ne pas être happé par la corruption et la servitude, dont la puanteur supplantait déjà celle des poubelles...
    
    Je prie pour que, à travers ce mouvement, un autre moyen de lutter contre la servitude et la corruption connaisse enfin le jour...